Une étude de l'Ifremer de Sète, publiée en mai, démontre une évolution positive de l'eau de la lagune sur 50 ans. Une rareté en France.
Cinquante ans après, coquin de sort, la qualité y est encore. Que le bon Georges nous le pardonne si nous détournons l'un de ses célèbres vers. Mais ce grand amoureux de l'étang de Thau apprendra avec plaisir, où qu'il soit, que la qualité de l'eau de l'étang de Thau est pratiquement identique à celle dans laquelle il se baignait, autour du phare de Roquerols, dans les années 70.
Une étude menée sur 50 ans
Tel est le résultat d'une étude menée sur une période de 50 ans par les scientifiques de l'Ifremer et de l'université de Montpellier et publiée, en mai 2020, dans la revue spécialisée Science of the Total Environnement. "Sur la lagune de Thau, on a la chance de disposer d'une longue série de relevés scientifiques qui remontent à 1970", explique Valérie Derolez, de l'antenne Ifremer de Sète, qui a rédigé cette étude. "Cela nous a permis de retracer la trajectoire de l'étang". Ces observations menées, donc, sur une période de 50 ans, se sont focalisées sur les teneurs en microalgues, en macro-algues, et l'eutrophisation (c'est-à-dire l'excès de nitrates et de phosphates).
Les herbiers étaient tombés à 10 %
L’eutrophisation de l’étang de Thau avait entraîné la disparition des herbiers marins au profit des macro-algues rouges. "En 1970, ces herbiers recouvraient 40 % des fonds marins. En 2003, ils n’en couvraient plus que 10 %", signale Valérie Derolez, de l’antenne Ifremer de Sète.
Au dernier relevé, en 2018, ces plantes sous-marines avaient reconquis 10 % de la surface. Il reste donc la moitié du chemin à parcourir pour retrouver le niveau de 1970. Mais cette augmentation de la surface des herbiers est un élément vital pour les poissons qui trouvent là de quoi se nourrir, et se mettre à l’abri pour pondre. Un bel exemple de restauration de l’environnement.
En revanche, on peut se poser la question de savoir si cette disparition d’éléments dans l’eau (on appelle cela l’oligotrophisation) a pour conséquence la disparition de coquillages comme la palourde. Pour résumer, s’il y a moins à manger est-ce que les plus fragiles peuvent disparaître ? "Ce n’est pas clairement identifié", répond Valérie Derolez, "rien n’est établi dans ce domaine".
L'efficacité des stations d'épuration
"Le problème des lagunes méditerranéennes, c'est la densification de la population et donc l'augmentation du déversement des eaux usées. Ce qui est assez unique en France, c'est que la lagune de Thau, malgré la grande augmentation de population, est parvenue à faire baisser, son eutrophisation", déclare la scientifique. Sur la période en effet, les rejets de phosphates ont été divisés par 10 et, entre 1990 et 2018, ceux d'azote ont baissé de 50 %. "Tout cela est dû à l'installation de stations d'épuration et la mise en place de vrais réseaux d'eaux usées sur le bassin-versant", conclue Valérie Derolez.
Amélioration à partir de 1993
"Le processus est très lent", concède la scientifique qui a découpé l'espace temporel de ce demi-siècle de résultats en deux grandes périodes. La première court de 1970 à 1992. C'est la pire. L'étang est saturé d'éléments indésirables. Les herbiers marins cèdent la place aux macro-algues rouges. Les malaïgues (qui se déclenchent par fortes chaleurs avec la décomposition d'éléments organiques privant l'eau d'oxygène) sont très fréquentes.
Une partie d'une étude globale
Cette étude sur la lagune de Thau fait partie d'un volet global de recherches concernant l'ensemble des lagunes du littoral français. Ces résultats seront divulgués le 9 juillet lors d'une conférence de presse à Nantes. Ce sera un état des lieux en terme de pollution chimique, d'eutrophisation, de bactériologie ou encore pollution microbiologique. L'étang de Thau sera pris en exemple pour son parcours vers la restauration de sa qualité de l'eau.
À partir de 1993, la situation s'améliore. À un train de sénateur maladif. Mais s'améliore. La spécialiste a même établi trois moments d'évolution. Jusqu'en 2003, il n'y a plus d'augmentation du niveau des éléments indésirables. La présence de ces derniers dans la colonne d'eau et leur composition chute brutalement entre 2003 et 2006. Et depuis, cette année-là, la qualité de l'eau s'améliore et les herbiers recommencent à recoloniser le fond de la lagune. "On n'est pas encore au niveau des années 70 mais ça progresse" (lire par ailleurs).
"Il faut rester vigilant"
"Avant 2006, il y avait une malaïgue tous les trois ans. Depuis cette date, on a passé douze ans sans en avoir une", argumente Valérie Derolez pour démontrer l'augmentation de la qualité de l'eau de la lagune. Depuis 1992, il y a six fois moins de risque d'un déclenchement d'une malaïgue que sur la période précédente. "L'étang, vu que la qualité de l'eau s'est grandement améliorée, peut résister plus facilement aux chocs. Mais cet équilibre reste fragile", concède la scientifique, "notamment en raison du changement climatique et de l'augmentation de la température". Et la dernière malaïgue avait été consécutive à de très fortes pluies printanières.
"Il faut donc rester vigilant. La lagune de Thau est un milieu assez fragile car dans un espace relativement confiné". L'épisode des eaux vertes en 2018 montre bien que de nouveaux fléaux peuvent changer la qualité de l'eau. Elle a mis trente ans pour se refaire une santé. Elle mérite donc quelques égards.
June 27, 2020 at 12:01AM
https://ift.tt/2BJwV8J
L'étang de Thau a retrouvé une qualité d'eau proche de celle de 1970 - Midi Libre
https://ift.tt/3etGGWT
étang
No comments:
Post a Comment